Des hommes et des dieux: l’avis de B00L

Alors que la première semaine de cours s’achève, il fallait bien que je me réconforte avec un film, mais pour une fois ce n’était pas un énième blockbuster où le seul plaisir est celui,  jubilatoire, de voir des montagnes de millions dépensés pour un film qu’on n’oubliera sitôt sorti de la salle (enfin je parle de salle mais des fois il suffit de fermer la fenêtre de VLC si vous voyez ce que je veux dire). Mais aujourd’hui c’est différent! Le film était déjà un des seuls dont j’avais retenu le nom pendant le festival de Cannes et en plus le thème collait parfaitement avec l’état d’esprit que je pouvais avoir après un gentil contrôle de physique de 4h un samedi matin…. Enfin bref tout ça pour dire que, bien sûr, ce film ne peut pas être qualifié de « divertissant » comme on l’entendrait pour le type de film évoqué ci-dessus. En effet, pour info, le réalisateur Xavier Beauvois avait déjà réalisé le très marquant « Le petit lieutenant ».

Commençons par le pitch: on pourras ainsi se focaliser sur l’essence du film.

Même si aucune indication temporelle ou spatiale n’est donnée clairement dans le film, celui-ci ce passe en Algérie dans les années 90 et s’inspire de l’histoire des moines cisterciens de Tibhirine; à cette époque, une vague de terrorisme vise les étrangers et les infidèles : nos moines sont en plein dans leur collimateur et cela se finira mal puisqu’ils seront kidnappés puis tués.

L’action se passe dans un décor rural au milieu des montagnes (les paysages sont d’autant plus magnifiques que la lenteur du film permet vraiment de les admirer), la pauvreté des villages là-bas fait que la présence des moines est un véritable support pour la population, une « branche » comme il est dit dans le film. On observe alors la vie quotidienne des moines : entre méditation, travaux de la terre, aide des villageois… La journée est rythmée aux sons des cloches, des cris d’enfants, du moteur du tracteur, des prières, du silence le plus souvent. On ne fait que contempler cette communauté soudée : que font-ils ici? Pourquoi? Ce sont les questions que certains se poseront alors que le danger arrive. Rester ou partir. La question est longtemps posée, chacun ayant une vie, un avis différent, une raison de rester ou de partir. Car n’oublions pas le titre du film: « Des hommes et des dieux », les moines sont avant tout des hommes, ils ont donné leur vie à Dieu et pourtant ils gardent toute leur liberté de choix. Un choix qu’ils finiront par faire : rester. Et même si leur décision d’hommes rentre en conflit avec le choix des gouvernements (français et algérien), il semble que ce choix dépasse tout cadre humain ou politique : il est moral (ou religieux, mais l’Église n’est en aucun cas présente, seul Dieu jugera). La poésie du film réside dans le choix et la liberté. La liberté de choisir leur mission pour les moines qui restent parce qu’elle n’est pas finie et non pas parce qu’ils souhaitent devenir des martyrs.

« Des hommes et des dieux » est un film sur les valeurs, des valeurs qui font des dieux à partir des hommes. L’introduction du film dit bien, en citant le psaume 82:
Vous êtes des dieux, vous êtes tous les fils du Très-Haut.
Cependant, vous mourrez comme des hommes, vous tomberez comme le premier venu des princes.

C’est bien un film « émotion », un « beau » film dans le sens où il s’admire, nous fait réfléchir, frissonner, pleurer, rire (avec Michael Lonsdale, chaque chose est source de rire). Sa lenteur qui peut paraître pénalisante n’est là que pour nous aider à nous immerger dans la vie monacale et /ou réfléchir aux phrases qu’on vient d’entendre.
Pour finir, je me dois de mentionner la fameuse scène, la seule scène où on entend de la musique dans le film (elle prend une dimension magique en partie à cause de cela). C’est au son du lac des cygnes de Tchaïkovsky, que se déroule une des plus magnifiques scènes que j’ai jamais vue au cinéma. Michael Lonsdale arrive dans la salle du souper au moment où Lambert Wilson finit le bénédicité, il a avec lui deux bouteilles de vins et une cassette audio, qu’il insère dans un magnétoscope, la musique commence alors qu’il vient rejoindre ses confrères à table. S’en suit un sublime panoramique puis des plans serrés sur chacun des visages exprimant tour à tour la joie, le rire, la tristesse (que l’on partage avec eux).

A ceux qui veulent un peu rêver dans ce monde de pourris.

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